La saint Valentin.

 

Le 14 Février pourrait n’être qu’un nouveau jour gris et sans amour, comme il en existe tant d’autres sur terre. (Et pas au ciel, où la notion de temps n’existe pas, bien entendu, et où volent des petits anges blonds et souriants).

Et pourtant non.

Le 14 Février, un inconnu transi viendra vous offrir des fleurs, à vous, jeune demoiselle, qui jusque là viviez uniquement d’eau fraîche. (Enfin je résume un peu, bien sûr… il y aussi le Nutella, par exemple, mais ne nous égarons pas, voulez-vous.).

Le 14 Février, des gens, plus ou moins connus, viendront vous voir le sourire aux lèvres et vous souhaiteront une bonne Saint Valentin.

Que vous vous appeliez Valentin ou non.

Que vous soyez amoureux ou non.

Vous n’y échapperez pas. (Tout comme vous n’échapperez que difficilement aux programmes télévisuels gluants de rose bonbon et de petits cœurs…)

Et vous vous poserez, nous nous poserons tous des questions sur cette fête étrange qu’est la saint valentin, qu’on est censé fêter chaque année sans trop savoir ce dont il retourne. En effet : Je ne m’appelle pas Valentin.
Vous ne vous appelez pas Valentin.
Nous ne nous appelons pas Valentin.
Regardez autour de vous : Ils ne s’appellent pas Valentin.

Personne ne s’appelle plus Valentin. Alors pourquoi donc souhaiter ainsi une bonne Saint Valentin à des gens qui ne s’appellent pas Valentin ?

C’est bien sûr la première question qu’il convient de se poser pour bien aborder le sujet.

J’en vois déjà qui sourient en lisant cette entrée en matière. " Mais il est bête ou quoi ? C’est la fête de tous les amoureux, bien sûr ! (pfff) ".
Réfléchissez, tout d’abord, au lieu de vous moquer d’un modeste journaliste qui n’hésite pas à prendre sur ses heures de sommeil pour vous distraire. Combien d’entre vous sont amoureux, hein ? ? ?

Bon, maintenant que vous avez entrevu l’absurdité de la chose, je vais maintenant vous révéler l’origine de cette fête païenne.
Car c’est une fête païenne. Une fête moyenâgeuse, telle qu’on peut se l’imaginer. D’ailleurs imaginons :
Les preux chevaliers sont partis combattre les hordes de barbares impies venus de contrées mystérieuses et éloignées pour prendre nos terres, nos femmes, et égorger nos enfants.
Le scorbut, la peste et le mildiou minent respectivement la populasse rurale et les récoltes, alors que le seigneur ordonne à ses vassaux de commencer le début des préparatifs de la saint Valentin. Famine ou pas, avec ou sans petite vérole, la fête aura lieu, comme chaque année, la fête médiévale de l’amour éternel.
Les hommes commencent à réfléchir au choix de leur cavalière. Déjà des conflits internes éclatent, affaiblissant encore la population, qui n’en demandait pas tant. Le Gillou et le Marcelus se disputent la grosse Géraldine, dont on sait au vu du châssis qu’elle sera une reproductrice qui tient la route. Le père Jacquot se demande bien laquelle de ses filles il offrira au seigneur pour la soirée… La Mauricette est bien jolie, mais un peu niaise, et la Fernande est bien besogneuse… une fois de plus le choix sera rude.

Et le soir, les festivités commenceront. La vinasse et la bière couleront à flot.
A la demeure du seigneur, l’orgie sera gargantuesque : des troubadours, des bouffons, des meufs, des victuailles.
Chez les serfs, les hommes iront aux femmes comme le taureau à la vache, avec la délicatesse rustre des ruraux moyenâgeux qu’on imagine sans peine.
Et le Gustave en profitera pour culbuter la Sandrine dans l’étable alors que son Mauriçot qui s’en était allé guerroyer, n’est peut-être même plus de ce monde.
Et les preux chevaliers s’en reviendront du champ de bataille, avec des cornes dépassant de leurs casques bosselés de coups de masses. Et les gentils frères inquisiteurs de la paroisse les feront rôtir en place publique, car n’est ce pas, les cornus, c’est des incarnations du malin.
Et la vie reprendra son cours, la Geraldine et la Sandrine seront en cloque, et accoucheront chez elles dans le froid et la douleur, d’enfants relativement difformes qui survivront peut-être à l’épidémie, si le temps le permet.
A l’épidémie succédera la famine, puis une autre épidémie, et de nouveaux seigneurs arriveront, plus ou moins sanguinaires, et les récoltes seront difficiles, et les femmes se feront violer dans l’anonymat et le secret, comme leurs mères et leurs grands mères le furent avant elles, pendant la saint Valentin, où les Valentins qui à l’époque étaient plus nombreux que maintenant, savaient s’amuser.

Bref.


Revenons-en à l’origine historique de la chose.
La plupart des rites qui étaient associés à la Saint Valentin sont maintenant disparus.
Autrefois, les amoureux devaient fabriquer eux-mêmes leur carte et composer leur déclaration d'amour. Tout cela se faisait dans l'anonymat...
Alors que maintenant tout fout le camp, et l’amoureux de base envoie une carte électronique préfabriquée, avec une rose en 256 couleurs, à l’élue de son cœur, qui la delete par inadvertance…

Au Moyen Âge, on appelait "valentin" le cavalier que chaque fille choisissait pour l'accompagner lors de sorties. Le cavalier devait faire un cadeau à la fille. C'est aussi le 14 février que les jeunes filles essayaient de deviner comment serait leur futur mari. Pour cela, elles regardaient les oiseaux: si elles voyaient un rouge-gorge, elles se marieraient avec un marin, un moineau signifiait un mariage heureux, mais avec un homme peu fortuné, tandis qu'un chardonneret indiquait un mariage avec un homme riche.
(Et je vous le demande : " Et le pigeon, dans tout ça ? ").
Alors que maintenant on utilise les outils d’aide à la décision, en effectuant par exemple une analyse de type multicritère prenant en compte les paramètres physiques, psychologiques, culturels, financiers, et affectifs, afin d’étudier les possibilités de développement durable de la relation de partenariat socio-sentimentalo-sexuel.
Bon.
Donc si l’on suit la logique de la chose, il apparaît qu’on ne doit fêter une Saint Valentin qu’aux garçons qui sortent avec une fille, vu que ce sont eux, les Valentins.
Donc ni aux filles, ni au célibataires.
Ou alors j’ai rien compris.

En ce qui concerne l'identité de saint Valentin, les historiens ne sont pas en accord. Au total, sept saints chrétiens prénommés Valentin sont fêtés le 14 février! Lequel est à l'origine de cette fête? Mystère!
La plupart de ces mêmes historiens croient que la Saint Valentin est associée aux Lupercales romaines. Les Lupercales étaient des fêtes annuelles célébrées le 15 février en l'honneur de Lupercus, le dieu des troupeaux et des bergers. Ces fêtes marquaient le jour du printemps, dans l'ancienne Rome. Pour cette occasion, on organisait une sorte de loterie de l'amour. Cela consistait à tirer au hasard le nom des filles et des garçons inscrits, de façon à former des couples qui sortiraient ensemble tout le reste de l'année.
Ils savaient s’amuser à l’époque.

On voit d’ailleurs tout de suite qu’en matière de politique sociale, les romains étaient bien plus avancés que nous. Voir d’ailleurs à ce sujet les efforts mis en œuvres actuellement par les diverses agences matrimoniales et sites de rencontre pour permettre à notre population de se reproduire.

Et avec quel résultat, je vous le demande ?

Des hommes désabusés, qui boivent dur en discothèque avant de se faire ratifier à droite et à gauche, et de vomir mou, au hasard des portes ouvertes des toilettes…

Bref, le premier qui me souhaite une bonne saint Valentin ne pourra pas dire que je ne lui aurai pas mis le nez dedans.


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